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"Nous ne voulons pas devenir des auteurs de flux"

Communiqué d’Addoc

jeudi 26 mai 2005


Le 1er juin, notre société d’auteurs, la Scam, nous appelle à voter pour construire.

Depuis plus de 20 ans, les auteurs de la Scam œuvrent pour défendre la création et les droits des auteurs. Alors parler de construction pour notre société aujourd’hui, signifie que quelque chose s’est cassé, s’est effondré.

Nous sommes entrés dans une époque d’extrême rentabilité, où tout ce qui est de l’ordre de l’art, de la culture, de la recherche, de l’éducation, de la santé... n’est plus pensé en termes de développement social et culturel mais géré de manière comptable.

Nous en faisons l’expérience au travers de la remise en cause du protocole concernant les annexes 8 et 10 en juin 2003, qui fragilise le statut social et économique de beaucoup d’entre nous engagés dans la création documentaire.

Alors construire pour quoi, construire pour qui, construire comment ?

Construire pour quoi ?

Nous construisons pour lutter contre la logique industrielle qui interdit aux cinéastes, auteurs, réalisateurs, mais aussi aux spectateurs, de regarder le monde en dehors d’un système de représentation pré-établi par les diffuseurs d’images et que nous nommons “formatage”. Ce “formatage” né de la publicité a gagné le Cinéma, la Télévision et l’ensemble du secteur audiovisuel.

Il nous faut donc affirmer à nouveau que toute image est le fruit d’un regard singulier, d’une relation particulière au monde, c’est-à-dire d’une prise de position morale et politique qui ne peut être que subjective.

Nous, cinéastes, auteurs, réalisateurs, nous devons résister à cette vague qui vise à rendre nos films invisibles et de plus en plus difficiles à produire, à mettre en œuvre.
Nous luttons auprès de nos institutions locales et nationales pour que les fonds publics destinés à la création ne soient pas détournés par des promoteurs audiovisuels, aux seules fins de vendre de l’espace publicitaire.

Construire pour qui ?

Nous œuvrons pour des spectateurs, pas pour des consommateurs.

Télé-réalité, docu-fiction, reportage en immersion..., tous ces genres télévisuels détournent les principes éthiques, esthétiques et politiques du cinéma documentaire et participent consciemment à la construction d’une image dominante, commercialisable, univoque, conséquence insidieuse d’un pouvoir économique qui construit une place sécurisée pour le spectateur, élimine toute pensée critique, et favorise la peur de l’autre.

En refusant de soumettre nos films à la standardisation, nous les concevons pour un spectateur libre, capable de se construire un regard et de penser le monde.

Construire comment ?

Si les principes fondateurs de notre société sont de défendre des droits pour les auteurs et une politique culturelle qui encourage la création et la diffusion des œuvres, alors elle doit s’opposer à la confusion entretenue entre œuvre et produit.

La commission audiovisuelle constituée par des auteurs, qui travaillent au classement des œuvres, selon leur degré d’élaboration et d’originalité, reste le lieu de résistance contre cette dérive.

Même si la mission de classement reste délicate, le travail de visionnement des œuvres par les auteurs est une manière de conserver un droit de regard sur la place du documentaire de création à la télévision.

C’est pourquoi nous estimons que le nouveau barème ne constitue pas un outil de construction.

Aujourd’hui l’administration de la Scam nous présente un barème pour la classification des œuvres en contradiction avec ses propres principes fondateurs.

Au lieu de résister à la politique de marchandisation des produits audiovisuels, le nouveau barème l’accompagne et la facilite dans une logique mécanique purement comptable.
En refusant toute donnée subjective dans l’appréciation des œuvres, et en ne prenant en compte que des critères objectifs, calqués sur le formatage des diffuseurs, le genre et la durée d’une œuvre, le nouveau mode de répartition des droits d’auteurs à la Scam ne fait que favoriser “le flux” et “les produits audiovisuels”.

Ce nouveau mode de répartition ne peut pas constituer un outil pour nous défendre politiquement et juridiquement contre les pratiques actuelles de production et de diffusion qui repoussent les auteurs en bout de chaîne, à un poste d’exécutant.

Nous nous opposons au nouveau barème audiovisuel que la Scam veut établir pour nos œuvres documentaires, parce que nous ne voulons pas devenir des auteurs de flux.

Paris, 26 mai 2005

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Contact :

Addoc

Association des cinéastes documentaristes

14, rue Alexandre-Parodi

75010 Paris

tél : (+33) (0) 1 44 89 99 88

ATTENTION NOUVEAU fax : (+33) (0) 1 44 89 89 11

courrier@addoc.net

http://www.addoc.net


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